Netflix est né grâce au DVD
Créé le 29 août 1997 (la date du Jugement Dernier annoncée par Sarah Connor et le T-800 dans le film Terminator 2 en 1991, à savoir le moment où l’intelligence artificielle Skynet est devenue consciente et a décidé d’éradiquer l’humanité) par Reed Hastings et Marc Randolph, le leader actuel de la vidéo à la demande par abonnement a commencé son activité en 1999 grâce à la location de DVD par correspondance. Les revenus générés par cette activité ont été investis dès le départ dans l’achat de serveurs et la construction d’une future plateforme de streaming, même si les infrastructures et les débits du web n’étaient pas encore prêts pour un streaming de qualité au tout début des années 2000. Reed Hastings savait dès le départ qu’internet allait révolutionner le marché de la location vidéo. C’est pour cette raison qu’il a nommé dès le départ sa compagnie Netflix (contraction des mots “internet” et “flicks” qui désigne les “films” en argot US), même si son activité initiale ne dépendait pas encore intégralement du web.
L’envoi de VHS par correspondance était problématique en raison de la fragilité de l’objet, mais ce souci a été résolu par l’apparition du format DVD à la fin des années 90, et c’est ce qui a convaincu Hastings de créer Netflix. Ce disque fin et léger peut se glisser facilement dans une enveloppe, avec des frais d’envois réduits et beaucoup moins de risques de détérioration pendant le transport. Le premier site web de Netflix dédié à la location de DVD par correspondance est lancé le 14 avril 1998, avec 30 employés et un catalogue de 925 films (ce qui représentait à l’époque à peu près tous les longs métrages disponibles dans ce format apparu sur le marché seulement un an auparavant).
Chaque DVD est envoyé par la poste à l’utilisateur dans une enveloppe, puis renvoyé à Netflix après visionnage grâce à une enveloppe retour contenue dans l’envoi initial. Au bout de quelques temps, les enveloppes Netflix sont devenues facilement reconnaissables grâce à leur habillage rouge associé à l’identité visuelle de la compagnie. Au départ, la facturation était déclenchée à chaque DVD loué, mais en septembre 1999, Netflix fait évoluer son modèle économique en lançant la possibilité d’un abonnement mensuel (qui devient son unique formule en 2000) : 10 $ pour un seul DVD, 15 $ pour 2 DVD à la fois, 20 $ pour 3 DVD à la fois, et 24 $ pour 4 DVD à la fois (les pénalités de retard n’existent pas chez Netflix). Il s’agit ici des tarifs établis en 2010, qui n’ont plus évolué depuis, et qui représentaient des offres très avantageuses durant la première décennie des années 2000 face aux tarifs bien plus élevés des DVD neufs.
Le concurrent historique "Blockbuster" a raté le coche
En 2000, l’activité de location de DVD de Netflix se développe vite, beaucoup trop vite. Bien plus que ses créateurs ne l’avaient anticipé. C’est un beau succès, mais l’aventure risque de tourner au désastre si de gros investissements ne sont pas rapidement réalisés. En mars 2000, la bulle internet explose et le fait de posséder une activité basée sur un site web passe du jour au lendemain d’un symbole d’optimisme économique à celui de honte entrepreneuriale, ce qui complique grandement l’espoir d’une levée de fonds. Comme le raconte le cofondateur Marc Randolph dans un tweet du 14 avril 2023, Reed Hastings et lui-même ont alors opté pour l’option de la dernière chance : vendre l’activité à leur plus gros concurrent pour éviter la catastrophe. Ils discutent donc avec Blockbuster Video pour se partager le marché : la location en magasin continuera d’être gérée par Blockbuster, tandis que la location par correspondance de Blockbuster sera conduite par les anciens de Netflix désormais absorbés par le leader incontesté de la location vidéo fondé aux Etats-Unis en 1985.
La rencontre entre les dirigeants des 2 compagnies se passe bien jusqu’au moment de l’annonce du montant désiré par Hastings et Randolph : 50 millions de dollars (à savoir la même somme que tout ce qui a été investi par Netflix depuis sa création). Les dirigeants de Blockbuster Video se retiennent de rire, et concluent rapidement l’entretien avec un “on va y réfléchir” qui fait office de point final à la discussion. Le géant du marché n’a pas pris son concurrent au sérieux, et il s’en mordra les doigts bien plus tard. En 2004, Blockbuster Video réalise enfin que le business model de Netflix est loin d’être mauvais, et il lance son propre service de location de DVD par correspondance nommé Blockbuster Online. L’idée fonctionne et le concurrent de Netflix atteint les 2 millions d’abonnés en 2006, juste avant d’ajouter en 2007 une option nommée Total Access qui permet de restituer les DVD loués par correspondance dans les magasins Blockbuster en échange d’un autre DVD sans surcoût. C’est encore loin des 6,3 millions d’abonnés de Netflix (qui affiche une augmentation annuelle de 79% de son nombre d’abonnés après quelques années à serrer les dents et à diluer ses investissements pour amortir le choc de sa croissance rapide), mais la progression fulgurante du leader de la location en magasin sur le marché de la correspondance en seulement 2 ans commence à inquiéter Netflix.
Sauf que dans les coulisses, Blockbuster Video affichait déjà des dettes d’un milliard de dollars au moment du lancement de Blockbuster Online (qui a nécessité un investissement supplémentaire de 200 millions de dollars). Pire : le développement de l’option Total Access qui permet aux abonnés de récupérer un autre DVD sans surcoût fait en vérité perdre 2 $ à Blockbuster par retour en magasin (la stratégie était d’attirer de nouveaux clients en magasin pour compenser ces pertes). Dans le même temps, Netflix fait également face à des difficultés liées à sa croissance rapide et à sa nécessité d’investissement, ce qui fait que le spécialiste de la location par correspondance a dû attendre 2003 avant de réaliser ses premiers bénéfices. Netflix dépose plainte contre Blockbuster en 2006 pour violation de brevets liés à son site web, mais le spécialiste de la location par correspondance investit également 1 million de dollars dans le développement de son propre algorithme de recommandation de futures locations de DVD pour ses clients (cet algorithme de recommandation de contenu deviendra plus tard l’une des grandes forces du service de streaming de Netflix).
Entre 2005 et 2007, des luttes de pouvoir à la tête de Blockbuster focalisent l’attention du leader de la location en magasins qui n’a toujours pas saisi que le virage de la vidéo en ligne est tout proche. La crise financière mondiale de 2007-2008 commence à creuser la tombe du géant qui n’a plus la capacité d’emprunter pour rembourser ses dettes. Blockbuster Video entre en liquidation judiciaire en septembre 2010 et commence à fermer ses 6 500 magasins (dont 4 000 sont situés aux Etats-Unis). La même année, Netflix atteignait les 20 millions d’abonnés aux Etats-Unis et démarrait son expansion à l’international. Le dernier véritable magasin Blockbuster a fermé ses portes au Brésil en 2018 (il en reste encore 3 dans le monde en 2023, mais ils sont indépendants du groupe principal). Au sommet de son histoire en 2004, Blockbuster possédait plus de 9 000 magasins et employait près de 84 000 personnes dans le monde. Netflix, qui demandait 50 millions de dollars pour être rachetée par Blockbuster en 2000, a aujourd’hui une valorisation boursière qui frôle les 150 milliards de dollars. Netflix employait 12 800 personnes dans le monde en 2022, soit le double du chiffre relevé en 2017.
Netflix envoyait encore des DVD par correspondance... jusqu’à aujourd’hui
Le service de streaming de Netflix est apparu en 2007, 10 après la création de la société, avec environ 1 millier de titres disponibles en ligne (contre 70 000 titres disponibles en DVD). Blockbuster Video a tenté de répliquer la même année avec sa propre offre de streaming en rachetant le service de VOD (Video On Demand) MovieLink pour 6,6 millions de dollars. Mais Blockbuster a sous-estimé le poids de Netflix sur ce marché et a continué à concentrer l’essentiel de sa stratégie sur les magasins physiques. L’offre de streaming de Netflix était à l’origine une option (appelée “Watch Now”) de l’activité de location de DVD par correspondance qui a été maintenue jusqu’à aujourd’hui en raison des infrastructures américaines qui sont encore loin de proposer de l’internet très haut débit sur l’intégralité de son immense territoire. Mais après 25 ans, Netflix met officiellement fin à son service d’envoi postal. L’entreprise a annoncé cette décision dans un tweet mardi, expliquant que ses derniers disques seront expédiés le 29 septembre 2023 :
Netflix a annoncé qu’il mettrait officiellement fin à son service de location de DVD hébergé sur le domaine DVD.com (que Netflix avait racheté en mars 2012) en septembre 2023 et qu’il accepterait les retours jusqu’au 27 octobre 2023. La société a également offert aux utilisateurs intéressés la possibilité de télécharger une copie des données associées à leur compte, qui contiendra le total des vidéos que l’utilisateur a louées au cours de son séjour chez Netflix, au cas où il le souhaiterait pour des raisons de nostalgie.
Pour une poignée d'irréductible attaché au service
La raison pour laquelle Netflix a mis ses DVD au placard n’est pas très difficile à comprendre : depuis que le streaming numérique a pris son essor, la location de supports physiques n’intéresse plus grand monde. Yahoo rapporte que Netflix gagne de moins en moins d’argent grâce à ces locations. L’année dernière, l’entreprise a réalisé un bénéfice de 145,69 millions de dollars, soit une chute de 20 % par rapport à l’année précédente. Il faut donc réduire, voire à éliminer ce qui fonctionne le moins bien (y compris le partage des comptes à partir de l’été 2023, même si cette pratique était autrefois encouragée par la compagnie qui en faisait un argument de vente).
Si de très nombreux américains ont cessé d’envoyer ces petites enveloppes rouges aux alentours du lancement du service de streaming en 2007, un nombre non négligeable de personnes a continué d’utiliser le système de livraison à domicile. En 2019, la dernière fois que Netflix a publié ses données concernant les abonnés aux DVD, il a recensé quelque 2,15 millions d’utilisateurs actifs. Pourtant, à ce moment-là, le nombre d’utilisateurs – et donc les recettes – était déjà en baisse constante depuis un certain temps.
Il n’en a pas toujours été ainsi. Au début des années 2000, alors que Netflix atteignait les sommets du marché de la location vidéo, son système de livraison à domicile lui a permis de rendre ses petites enveloppes rouges omniprésentes dans les foyers nord-américains. Là-bas, ces enveloppes rouges resteront certainement un symbole nostalgique de l’époque d’avant le streaming, une époque où les DVD et les Blu-ray étaient rois.
En parallèle à cette annonce qui n’affecte que le marché nord-américain, Netflix a dévoilé quelques anecdotes et statistiques. Le premier DVD Netflix envoyé par la poste le 10 mars 1998 (soit un peu plus d’un mois avant l’ouverture du premier site web de la compagnie) était le film Beetlejuice de Tim Burton. Le DVD le plus demandé par les abonnés Netflix est le biopic The Blind Side réalisé en 2009 par John Lee Hancock. Passé relativement inaperçu en France où il est sorti directement en DVD en 2010, ce film consacré à un joueur de football américain s’est distingué en cartonnant dans les salles américaines (atteignant la 10e place du box-office national l’année de sa sortie), et en permettant à Sandra Bullock d’obtenir un Golden Globe ainsi qu’un Oscar de la meilleure actrice. En 25 ans, Netflix a fait parvenir plus de 5,2 milliards de DVD à environ 40 millions d’abonnés uniques à son service par correspondance.
La fin des DVD Netflix, mais bientôt des gros jeux vidéo
A l’issue de son 1er trimestre 2023, Netflix a annoncé 232,5 millions d’abonnés dans le monde, ce qui représente une progression de 4,9 % par rapport à l’année précédente. Mais l’année 2022 a été compliquée pour le marché de la SVOD (Subscription Video On Demand) qui a commencé à patiner et dont les plus grands concurrents de Netflix (Disney+ et HBOmax en tête) ont annoncé réduire leurs investissements face à la difficulté de les rentabiliser rapidement (essentiellement sur le marché américain qui est saturé d’offres incapables de dégager des bénéfices à court terme).
En tant que leader, Netflix est également concerné par le ralentissement et la désillusion du marché de la SVOD. Tout comme ses concurrents, Netflix doit freiner ses investissements en termes de contenu exclusif (films et séries) en complément de sa nouvelle offre moins chère qui inclut des publicités (dont la qualité passe de 720p à 1080p, et qui est disponible sur 2 écrans simultanés dès le 19 avril 2023 au Canada et en Espagne, ce qui préfigure un déploiement mondial très proche), sans parler de sa nouvelle politique visant à éradiquer le partage de comptes (ou à capitaliser dessus en demandant aux partageurs de payer un supplément).
Contrairement à ses plus gros concurrents, Netflix n’appartient pas à un groupe dont la SVOD n’est qu’une activité annexe dont les pertes peuvent être compensées par les autres pôles. Le géant de Reed Hastings doit donc continuer d’investir pour capter de nouveaux abonnés (et ne pas perdre ses souscripteurs actuels), et il semble que ce futur se fera du côté du jeu vidéo. Trop peu d’utilisateurs savent que leur souscription à Netflix leur permet de jouer à des jeux vidéo sur mobile (et tablettes) sans la moindre publicité (moins de 1% des abonnés Netflix jouent quotidiennement à l’un de leurs jeux). Lancée en 2021, l’offensive de Netflix sur le gaming mobile a débuté par des petits jeux parfois liés à leurs propres franchises (comme Narcos ou Stranger Things). Mais depuis 2022, ce sont des jeux réputés et déjà disponibles sur d’autres plateformes qui ont commencé à être proposés aux abonnés Netflix, comme par exemple Twelve Minutes, Soldats Inconnus : Frères d’Armes ou encore TMNT : Shredder’s Revenge.
Et ce n’est que le début, car Netflix a annoncé vouloir sortir 40 nouveaux jeux en 2023. 70 jeux sont en cours de développement via des prestataires externes, et 16 jeux supplémentaires sont en développement en interne (suite à l’ouverture de ses propres studios de développement en Finlande et en Californie fin 2022). Netflix a annoncé en novembre 2022 son intention de développer sur PC un jeu AAA (comprendre par-là : un poids lourd à gros budget) qui sera vraisemblablement un shooter de type jeu service, à savoir un jeu gratuit dont de nombreux éléments cosmétiques ou facilitant la progression peuvent être acquis en les achetant. Cette annonce a été confortée le 17 avril 2023 par des tweets de Joseph Staten, un vétéran des studios Bungie et Xbox Game Studios (anciennement Microsoft Studios) qui était fortement impliqué dans l’écriture de scénarios et la réalisation de cinématiques pour les 3 premiers jeux de la série Halo, avant de travailler sur le premier Destiny :
Staten y déclare qu’il rejoint le studio de développement de Netflix en tant que Directeur Créatif afin de travailler sur une nouvelle licence de jeux AAA destinée à plusieurs plateformes. Les exécutifs de Netflix déclarent que le jeu vidéo est la priorité principale de la compagnie à l’heure actuelle, et les faits semblent rejoindre les déclarations de cette compagnie qui a toujours placé les investissements et l’innovation au cœur de sa stratégie afin d’avoir en permanence un coup d’avance sur le marché.
S’il n’y avait qu’une seule leçon à retenir de l’histoire de Netflix, c’est qu’un business model doit être en permanence réfléchi et adapté aux réalités de son marché pour savoir y évoluer et se placer comme un acteur incontournable.
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