Le succès fulgurant du nouveau réseau social Noplace ainsi que l’évolution continue des fonctionnalités de Spotify nous donnent un aperçu de l’évolution de ces réseaux… qui semblent revenir aux sources de ce qui était au coeur des premiers réseaux sociaux.
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Noplace : le MySpace de la Gen Z
Noplace, c’est le réseau social émergent dont tout le monde parle début juillet 2024, alors qu’il squatte la première place des téléchargements sur la version US de l’App Store iOS. Et il faut avouer que son fonctionnement diffère légèrement des mastodontes du moment.
Pour commencer, il ne s’agit pas d’un réseau sur lequel il est possible partager des photos ou des vidéos. Rien qu’avec ça, son concept s’éloigne déjà énormément des TikTok, Instagram et autres BeReal qui sont les grands succès du moment. Noplace, c’est plutôt une page de profil colorée (on y revient !) avec quelques infos (âge, anniversaire, genre, statut amoureux) et une liste de sujets (ou fandoms) qui intéressent la personne en question. Il y a aussi un « mur » (comme autrefois sur Facebook) où chacun peut partager ce qui lui passe par la tête, ce qu’il est en train de faire, ce qu’il regarde ou ce qu’il écoute, et l’application possède bien évidemment sa propre messagerie privée (contrairement à Threads qui n’en a toujours pas). En gros, on y communique exclusivement par le biais de (courts) textes.
La fonction qui semble séduire le plus sur Noplace, c’est la personnalisation de son profil. Chaque utilisateur peut en effet modifier les couleurs de l’interface : la couleur de fond, la couleur du texte, et la couleur des contours. Cette personnalisation est une volonté de la créatrice de l’app, Tiffany Zhong, qui trouve que les réseaux actuels sont trop uniformes (et elle n’a peut-être pas tort).
Ni algorithme, ni likes chez Noplace... mais de l'IA bien sûr !
Tiffany Zhong est également nostalgique des débuts de Facebook, où on pouvait prendre des nouvelles de nos amis par le biais de petites mises à jour régulières. Et il faut avouer que Facebook ne sert plus vraiment à ça de nos jours. D’ailleurs, quel réseau social sert encore à ça vu qu’ils sont maintenant inondés de publicités (il n’y en a pas sur Noplace) et que vous ne choisissez plus vraiment ce que vous y voyez.
Ce qui séduit également chez Noplace depuis son lancement public aux États-Unis le 3 juillet, ce sont certaines de ses promesses techniques. L’app ne fonctionne pas grâce à un algorithme de recommandations, mais plutôt grâce à une IA qui vous propose de voir des statuts correspondant à vos centres d’intérêt, ainsi que des résumés de ce que vous avez raté. Plus vous intéragissez avec certains types de posts, plus l’IA cible ce qui est susceptible de vous intéresser. Est-ce vraiment si différent du fonctionnement des algorithmes de réseaux sociaux au final ? C’est ce qu’on verra à l’usage. En tout cas, chez Noplace, le fait d’apprécier une publication ne la met pas davantage en avant chez les autres utilisateurs. Elle permet simplement au système de mieux apprendre à vous connaître pour vous proposer du contenu similaire.
La fonction de personnalisation du profil rappelle tout de même furieusement MySpace, sans parler du fait de faire apparaître ses 10 amis préférés sur son profil. MySpace était le plus gros réseau social du début des années 2000, mais il a fini par se faire dépasser par Facebook à partir de 2010, et le réseau a progressivement été déserté par ses utilisateurs. D’ailleurs, savez-vous que MySpace existe toujours ? Bref, c’est probablement une bonne chose que les options de personnalisation de Noplace soient plus limitées que celles de MySpace à l’époque (que celles et ceux qui ont passé des heures à bricoler du code html pour personnaliser leur MySpace lèvent la main), car certains profils provoquaient des saignements oculaires alors que leur contenu écrit était de bonne qualité.
Reste à voir comment Noplace va consolider sa présence sur le marché des réseaux, et surtout, si l’app survivra grâce à un éventuel modèle économique. Mais il est tout de même intéressant de noter que cette app a été construite en se basant sur la nostalgie de réseaux sociaux qui ont presque disparu ou qui ont tellement muté que leur fonctionnement d’origine n’existe plus vraiment aujourd’hui.
Spotify devient un réseau social à part entière
Après avoir initié sa transformation visuelle en 2023, Spotify continue d’évoluer et ajoute début juillet 2024 une nouvelle fonction qui permet aux utilisateurs de commenter les podcasts qu’ils écoutent. Et les podcasteurs peuvent répondre à ces commentaires, en complément des sondages et des Q&A qu’ils pouvaient déjà utiliser depuis 2021. Si on additionne cette nouvelle fonction avec la nouvelle apparence de l’app qui la rapproche beaucou de celle de TikTok, on peut aisément considérer que Spotify évolue du statut de lecteur musical à celui de réseau social, puisqu’il devient possible d’y tenir de véritables conversations et échanges dans les commentaires (au même titre que YouTube qu’on oublie souvent de considérer comme un réseau social).
Spotify pourrait faire revivre l'idée de Ping imaginée par Steve Jobs ?
On peut imaginer que la prochaine étape pour Spotify serait de laisser ses utilisateurs intéragir avec les artistes dont la musique est diffusée sur la plateforme. Les amateurs de musique sont en effet des communautés très engagées et vraiment désireuses d’échanges et d’interactions. Steve Jobs l’avait bien perçu en septembre 2010 lorsqu’il avait lancé Ping, un réseau social centré sur la musique et intégré au logiciel iTunes. Mais cette fonction n’a jamais trouvé son public, son utilisation était marginale, et elle n’a pas survécu au décès de son créateur puisqu’elle a été retirée en septembre 2012.
Une fois encore, cette nouvelle fonctionnalité éventuelle rappelle beaucoup un ancien réseau social qui a fini par disparaître. Si la demande pour cette fonction est réelle, elle montre que le public est désireux de revenir à des interactions sociales en ligne plus directes et non polluées par de la publicité et des algorithmes.
Les réseaux sociaux sont en pleine mutation
Tout cela semble encore une fois confirmer que les réseaux sociaux, tels qu’on les connaît depuis la crise sanitaire de 2020, sont arrivés à une forme de maturité, et que le public est désireux de nouvelles options d’interaction plus saines et plus sincères (à l’image de l’essor actuel du dark social qui privilégie les échanges directs entre utilisateurs, sans passer par les réseaux classiques.
On n’arrête pas de dire que Facebook est dépassé, et pourtant le réseau de Mark Zuckerberg reste loin devant tous ses concurrents. On ne cesse de dire qu’Elon Musk a tué Twitter en le transformant en X et en ouvrant la porte aux pires types de contenus. Pourtant, aucun de ses concurrents directs (Bluesky, Threads) n’a encore véritablement réussi à lui prendre sa place.
Mais quoiqu’il arrive, l’âge d’or des réseaux les plus anciens est peut-être derrière eux et de nouveaux usages vont forcément émerger. Il reste essentiel de se tenir au courant des nouvelles tendances afin de ne pas rater les moyens de communication qui feront fureur dès demain.
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