On oublie parfois à quel point le net est en évolution constante, et les réseaux sociaux en sont le reflet le plus visible. Cela fait désormais plus de 15 ans que Facebook a atteint les 100 millions d’utilisateurs (ils sont aujourd’hui plus de 3 milliards). Et notre façon de poster du contenu sur les réseaux a pas mal changé avec le temps. Regardez vos souvenirs Facebook : ils sont le reflet de ce que vous postiez autrefois, et que vous ne posteriez probablement plus aujourd’hui. Qu’est-ce qui a changé ? Explorons ci-dessous les dernières tenaces en matière de partage de contenu.
Table des matières
État des lieux des réseaux sociaux début 2024
Publicité omniprésente, bots et influenceurs...
Tout a bien changé depuis 10 ans, même si Facebook reste de loin le réseau social comptant le plus d’utilisateurs (3,05 milliards) début 2024. Si on ne compte pas YouTube (2,7 milliards d’utilisateurs), Instagram a tranquillement atteint la seconde place actuelle avec 2,4 milliards d’utilisateurs. Seulement, l’âge moyen des utilisateurs de ces deux plateformes a évolué. Si les 18-25 ans étaient largement majoritaires sur Facebook en 2010, ils ont été dépassés par les 26-34 ans qui représentent à eux seuls 31% des utilisateurs (en vérité, il s’agit probablement des mêmes utilisateurs qui ont simplement continué à utiliser la même plateforme). Sur Instagram, ces deux tranches d’âge sont au coude à coude avec plus de 30% d’utilisateurs chacune. Même si c’est encore loin d’être catastrophique, cela signifie que la population de ces réseaux est vieillissante. Mais le groupe Meta a un problème encore plus important : son image de marque ! Celle-ci a en effet été bien écornée par le biais de scandales à répétition depuis 2018, essentiellement dans le domaine de la protection des données personnelles. Et ces deux réseaux ont aujourd’hui la réputation d’être remplis de publicités.
Twitter aurait pu devenir très grand, mais le réseau renommé X après son rachat par Elon Musk a nettement ralenti sa progression en nombre d’utilisateurs (528 millions) ces dernières années, et connaît un désamour grandissant, aussi bien du côté des utilisateurs fatigués par les bots et le manque de modération, que du côté des gros annonceurs qui ont déserté la plateforme en raison des prises de position de plus en plus extrêmes de son dirigeant.
Qui se souvient encore de Google+ ? En 2011-2012, ce réseau avait connu des débuts impressionnants, mais son utilisation s’était rapidement effondrée. Même si Google+ a officiellement fermé ses portes en 2019, cela faisait de nombreuses années que ce réseau était devenu un désert social.
Car celui que personne n’avait vu venir, et qui a largement dépassé Snapchat (750 millions d’utilisateurs) et LinkedIn (900 millions d’utilisateurs) avec son ascension fulgurante démarrée en 2018, c’est TikTok qui compte désormais 1,7 milliard d’utilisateurs dans le monde. Ce qui a également beaucoup changé ces dernières années sur les réseaux sociaux, c’est l’arrivée massive des influenceurs, démarrée en 2015 via Instagram, et qui a encore explosé avec l’ascension de TikTok.
Le marketing d’influence a le vent en poupe, et cela n’est pas près de s’arrêter ! En 2023, 76,7% des influenceurs déclaraient être présents sur Instagram, et on s’attend à ce que 80,8% d’entre eux s’y concentrent en 2024. Instagram est donc de loin la plateforme la plus touchée par ce phénomène. En seconde place des plateformes utilisées par les influenceurs, on trouve Facebook avec 58% d’entre eux qui déclarent y être présents. La plateforme qui a connu la plus grosse croissance récente en terme de présence d’influenceurs est évidemment TikTok avec 50% d’entre eux qui y sont présents, et on s’attend à ce que ce chiffre atteigne 54% en 2024. Dans la suite du classement, les influenceurs sont présents à 44,2% sur YouTube, à 25,5% sur X 5twitter) et à 18,5% sur Snapchat.
Vous ne choisissez pas ce que les réseaux sociaux vous montrent
Connaissez-vous vraiment la série Netflix la plus regardée en 2023 ?
Les réseaux d’aujourd’hui se sont adaptés à l’explosion de TikTok et à son célèbre onglet « pour toi » à l’algorithme efficace et addictif. Du coup, ces réseaux ne vous montrent plus forcément ce qui est le plus susceptible de vous intéresser, mais plutôt ce qui a le plus de chance de vous faire réagir et de vous maintenir le plus longtemps possible sur la plateforme (afin de maximiser le temps que vous passez à regarder des publicités). Cela semble proche, mais en vérité il existe une nuance subtile entre ces deux idées.
Prenons l’exemple de la série la plus regardée sur Netflix dans le monde en 2023. S’il s’agit de la série la plus regardée, ça doit signifier que c’est la série qui a été la plus discutée sur les plateformes. Or il n’en est rien ! La série Netflix la plus regardée (et de loin !) en 2023 se nommait The Night Agent. En avez-vous entendu parler ? Probablement pas… Pourtant The Night Agent a été 60% plus vue que la série événement Mercredi, dont tout le monde, ou presque, a parlé sur les réseaux. Vous commencez à saisir le problème ? La série Mercredi de Tim Burton est bien plus susceptible de créer de l’engagement et de l’interaction sur les réseaux que The Night Agent, et c’est pour cette raison que vous avez beaucoup vu passer l’une d’entre elles sur les réseaux, et pas l’autre. C’est pour ces mêmes raisons que bien plus d’influenceurs ont parlé de Mercredi que de The Night Agent. Plus que jamais, les réseaux sociaux ne sont pas le reflet de la réalité.
Dans le même ordre d’idée, vous n’avez probablement pas vu passer la make-up routine de Nyadollie sur TikTok, alors qu’il s’agit pourtant de la vidéo la plus vue sur la plateforme en 2023 aux Etats-Unis, qui cumule 511 millions de vues et 38 millions de likes début 2024.
Les conversations se sont déportées vers les groupes privés
The Dark Side Of The Social
En raison de la visibilité exagérée des influenceurs et du contenu plus engageant (mais moins qualitatif), les utilisateurs se sont déportés vers ce qu’on appelle le « dark social » pour partager en privé à des groupes plus restreints ce qui était autrefois partagé en public. Ces discussions ont donc désormais lieu sur Discord, sur des groupes WhatsApp ou sur channels Telegram. En conséquence, les réseaux traditionnels sont de plus en plus occupés par les influenceurs, et le phénomène n’est pas près de s’arrêter. Adam Mosseri lui-même, le grand responsable d’Instagram, déclarait à la mi-2023 qu’il y avait désormais davantage de photos et de vidéos partagées par messages privés sur Instagram que dans les stories.
Les réseaux traditionnels se tournent vers les formules payantes
Les réseaux « sociaux » tels qu’on les a connus depuis 2010 sont en train de disparaître pour laisser place à des réseaux de plus en plus « pro »… et payants. En effet, les réseaux tels que X (ex-Twitter) et ceux du groupe Meta (Facebook, Instagram) proposent désormais des formules payantes qui permettent d’éliminer les publicités omniprésentes, et, dans le cas de X, de voir ses propres publications boostées par l’algorithme en termes de visibilités. Il s’agit là de la meilleure preuve que ces réseaux sont en train de se professionnaliser pour offrir de la visibilité à ceux qui sont prêts à y mettre les moyens. En conséquence, nos usages évoluent et nous sommes de plus en plus amenés à réagir avec du contenu proposé par les professionnels et autres influenceurs, plutôt que de proposer nous-même du contenu. Gartner estime que 50% d’entre nous vont drastiquement baisser leur niveau d’interaction sur les réseaux sociaux d’ici à 2025.
L’image qui est de plus en plus employée pour illustrer cette mutation des réseaux sociaux est la suivante : autrefois, nous avions pour habitude de nous rencontrer et d’échanger au sein de grands centres commerciaux. De nombreuses marques et publicités nous entouraient, mais cela ne nous gênait pas trop. Aujourd’hui, ces centres commerciaux sont de plus en plus envahis de publicités assourdissantes et de démonstrateurs qui nous empêchent de discuter (sans parler des trolls et des bots), d’autant plus que leur accès à tendance à devenir payant. Du coup, nous nous réunissons en petits comités, dans des endroits plus calmes, avec des personnes de confiance qui partagent les mêmes centres d’intérêt que nous.
Quel est le futur des réseaux sociaux ?
Les remplaçants de Google ?
Il paraît désormais évident que les plateformes de partage de contenu telles qu’on les a connues jusqu’ici vont évoluer vers des plateformes de distribution de contenus par des professionnels, ou, du moins, par des créateurs de contenu qui vont tendre à se professionnaliser davantage. La popularité de ces plateformes ne baissera pas pour autant, au contraire, mais dans le même temps, vos propres partages seront déplacés vers d’autres lieux communautaires en ligne. Les réseaux sociaux vont simplement devenir de moins en moins sociaux, et de nouvelles façons de partager votre quotidien et vos états d’esprit vont émerger.
Et cette mutation ne s’arrête pas là. On le sait, les jeunes utilisent de plus en plus TikTok comme moteur de recherche. Plus de 2 américains sur 5 utilisent déjà TikTok comme moteur de recherche à la place de Google, et près d’un jeune de la Génération Z sur 10 déclare être plus enclin à faire confiance à TikTok comme moteur de recherche par rapport à Google. Cette tendance est loin d’être anodine et les annonceurs commencent déjà à s’y adapter, en faisant notamment appel à des influenceurs pour promouvoir leurs produits ou services.
Il est difficile de savoir précisément comment les réseaux sociaux vont évoluer dans les 10 années à venir. Ils ont déjà beaucoup changé depuis 10 ans, et ce n’est pas terminé. Mais c’est une bonne nouvelle ! Car cela laisse de la place à de nouveaux acteurs qui vont émerger en même temps que de nouveaux usages. Peut-être que le futur appartiendra à une startup française qui inventera un concept universel, à condition qu’elle sache mieux rebondir que Mindie qui avait manqué de soutien alors qu’elle avait le potentiel de devenir TikTok avant TikTok.
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